Jours 142 & 143 : Phnom Penh, une ville chargée d’histoire…

Jours 142 & 143 : Phnom Penh, une ville chargée d’histoire…

 22 & 23 janvier 2012

J142&143_Phnom Penh

Ballade dans Phnom Penh :

Nous arrivons à Phnom Penh en fin de matinée, après un trajet de 6h de bus durant lequel nous avons vu défiler la campagne cambodgienne… par moment, cela nous rappelle étrangement les paysages du nord de l’Inde (la campagne aride, les vaches toutes maigres sur le bord des routes…), on a l’impression de faire des bonds quelques semaines en arrière !

Le bus nous dépose près du marché central de Phnom Penh et à peine sommes-nous sortis du bus, que des dizaines de chauffeurs de tuk-tuk viennent s’agglutiner autour de nous pour tenter de nous amadouer (oui, oui, un petit aire de l’Inde, je vous le disais !). On check le guide vite fait et on se rend compte que les distances à pied ne sont pas énormes, alors on décide de marcher, comme ça, il n’y aura pas de jaloux ! Nous déposons nos affaires dans une guesthouse et repartons illico-presto pour découvrir la ville.

Phnom Penh est en fait une ville qui “renait de ses cendres” en quelques sortes, puisqu’elle a été intégralement anéantie suite à la prise de pouvoir des Kmers rouges en 1975 (l’année 1975 fut qualifiée d’”année zéro”). On a peine à y croire lorsque l’on marche dans les rues car aujoud’hui, la ville est animée et vivante, dans un curieux mélange de charme et de chaos.

Rues du centre de Phnom Penh

Nous commençons par remonter le quai Sisowath, qui borde la rivière “Tonlé Sap”. Une promenade est aménagée sur le bord des quais, ce qui permet d’éviter un peu la circulation incessante (voitures, vélos, tuk-tuk qui circulent dans tous les sens, sans trop se soucier des piétons !). Le bord des quais est bordé de bars, restaurants, salons de massage et agences de voyage en tout genre. Impossible de faire deux pas sans qu’un tuk-tuk vienne nous proposer de nous conduire quelque part (en nous posant l’éternelle question “where you go ?”)… quand on voit le nombre de tuk-tuk dans cette ville, on se dit que ces gars doivent vraiment trimer toute la journée pour gagner quelques sous…

Quai Sisowath

Nous remontons ainsi le quai jusqu’à atteindre le Vat Phnom, un temple perché sur une petite colline (la seule colline de la capitale). Et alors que nous nous dirigeons tranquillement vers le temple, qui est-ce que nous apercevons, là, juste devant nous ?… Morvan & Marie ! Nos copains voyageurs rencontrés au Laos et avec qui nous avons passé nos premiers jours au Cambodge. C’est vraiment la pure coïncidence de les revoir ici ! Du coup, on se dit que ce doit être un signe du destin et nous décidons de passer la fin de la journée tous les 4 !

Le Vat Phnom

Intérieur du temple

Déco murale

Offrandes et bougies

Après avoir visité le Vat Phnom, nous décidons de partager un tuk-tuk tous les 4 pour aller jusqu’au marché russe (un gros marché dans lequel on trouve tout un tas de trucs).

Malheureusement pour nous, nous sommes le jour du nouvel an chinois, et quasiement toutes les étals du marché sont fermées. Nous nous contentons d’un petit tour dans le marché de fruits et légumes, qui est toujours aussi animé et coloré (comme la plupart des marchés en Asie) et on en profite pour acheter quelques clémentines.

Petit marché à coté du marché russe

Notre petit tour terminé, nous reprenons le tuk-tuk et nous décidons d’aller voir un match de boxe cambodgienne. C’est Morvan & Marie qui nous suggère l’idée et nous sommes complètement au taquet ! En fait, lorsque nous étions en Thailande, on voulait absolument aller voir un match de Muay Thaï (la boxe thaï) mais vu le prix exorbitant des billets, on avait laissé tomber. Ici au Cambodge, ce n’est pas de la boxe Thaï, c’est du kick-boxing cambodgien, mais comme de toute façon on ne s’y connait rien en boxe, on ne verra pas la différence… et cerise sur le gateau : les matchs sont gratuits ! Il s’agit de matchs de gala entièrement financés par les sponsors… cool ! Nous arrivons super tôt au gymnase (enfin, au “ring” quoi !) et prenons les places tout devant.

Le ring !

Nous assistons à 6 matchs : le premier se joue entre deux jeunes adolescents « poids plume », ça fait un peu mal au cœur de les voir se mettre des coups alors qu’ils sont encore tout gringalets… le second match se joue entre deux femmes et les 4 combats suivants se jouent entre des boxeurs professionnels. Les combats sont vraiment impressionnants et nous ne pensions pas qu’ils seraient aussi violents, surtout pour un match de gala ! Trois des quatre derniers combats se termineront par un « KO », dont l’un d’eux est vraiment refroidissant (le boxeur a le regard complètement dans le vide pendant plusieurs minutes et il ne tient plus sur ses jambes…). Certains d’entre eux finissent le visage en sang et malgré le fait que les combats soient sans enjeu, les cambodgiens sont vraiment déchainés dans la salle et ils s’emballent dès que les coups fusent et qu’il y a du sang… On ose à peine imaginer l’ambiance qu’il doit y avoir dans les grands stades les soirs de matchs ! Quant à nous, nous nous regardons un peu interloqués, on a pas l’habitude d’assister à ce genre de combat ! Nous sommes tout de même content d’avoir pu assister à ces matchs car ça fait partie intégrante de la culture cambodgienne (c’est un peu leur sport national ici, tout comme peut l’être le foot en France).

Quelques photos des boxeurs

Préparation…

Concentration…

Action !

Nous finissons la soirée avec Morvan & Marie dans un petit resto sympa au cœur de la ville, tout près des quais, puis nous regagnons nos hôtels et nous nous disons aurevoir… cette fois-ci, il y a vraiment peu de chance que nous nous recroisions compte tenu de nos itinéraires respectifs !

Le musée Tuol Steng, ou l’enfer des Khmers rouges :

Nous commençons la journée par un bon ptit dej’, avec quelques provisions achetées la veille dans une supérette : pain complet, beurre et confiture ! Attention, c’est du grand luxe ! Une fois nos estomacs rassasiés, nous partons à pied pour rejoindre le musée “Tuol Steng”, ou musée du crime génocidaire…

Nico, pas encore bien réveillé !

Miam, miam !

Pour vraiment comprendre l’histoire du Cambodge et des Cambodgiens, il est nécessaire de faire un petit saut dans le passé, il y a exactement 36 ans en arrière…

Avril 1975 : la capitale, Phnom Penh, tombe aux mains des Khmers rouges, menés par leur leader, Pol Pot (rien que ce nom fait froid dans le dos…). Les Khmers rouges s’emparent de la capitale et procède  à son évacuation totale, en moins de 48h ! Ainsi, des millions de cambodgiens sont déportés de force vers les campagnes et la capitale, considérée comme étant une des plus belle d’Asie du Sud-est, devient une ville fantôme. Les Cambodgiens perdent tous leurs repères : séparés de leurs familles, ils connaissent la déportation, les travaux forcés, la faim, la peur et les séances de « rééducation », où le moindre prétexte peut conduire à une mort imminente… La nation perd tous ses symboles : la monnaie est supprimée, les livres sont brulés, les biens matériels sont confisqués, les hôpitaux sont vidés, les lycées sont fermés, les villes sont condamnées… Les Khmers rouges haïssent les signes d’intelligence, leur dicton étant « il faut mieux tuer un innocent que de garder en vie un ennemi » ou encore « vous garder n’est pas un gain, vous perdre n’est pas une perte ». Durant 4 ans, la terreur des Khmers rouges règnera sur le pays devenu un vaste camp de concentration. On estime qu’en 4 ans, près de 2 millions de cambodgiens ont péri (maladies, famines, et bien sur, massacres…).

Ainsi, la prison de Tuol Steng, constitue un bouleversant témoignage des atrocités commises par les Khmers rouges. Ce musée était auparavant un lycée, avant que les forces de Pol Pot ne prennent possession des lieux en 1975, le transformant en prison de haute sécurité, ou « S-21 ». Ce fut alors le plus grand centre de détention et de torture du pays. Des dizaines de milliers de victimes (paysans, ouvriers, techniciens, ingénieurs, bonzes, ministres, militaires, étrangers,…) y étaient emprisonnés et exterminés avec leur femme et leurs enfants. Ainsi, près de 20 000 personnes y ont trouvé la mort. Un bon nombre de preuves retrouvées à l’intérieur de la prison révèlent les atrocités et les tortures les plus barbares perpétrées par les Khmers rouges : cellules en brique et en bois, instruments de torture, documents & photos des détenus (avant et après leur massacre…), vêtements des victimes exterminées.

Le lycée, devenu prison, puis musée…

Le règlement des détenus

Les couloirs de la prison

“Chambres” des détenus

Bien entendu, la visite de ce musée nous a semblé indispensable pour mieux comprendre l’ampleur du désastre perpétré par les Khmers rouges. Nous déambulons silencieusement entre les différentes parties du musée que nous découvrons successivement : photos en noirs et blancs des hommes, femmes et enfants avec leur numéro de matricule, cellules individuelles dans lesquelles les gens étaient emprisonnés, instruments de torture et lits rouillés sur lesquels les prisonniers étaient enchainés et torturés,… le silence s’impose de lui-même et l’atmosphère est glaciale.

Notre règlement à nous…

L’endroit est d’autant plus touchant car vu de l’extérieur, on se croirait tout bêtement dans la cour de récréation d’un lycée et on a du mal à imaginer comment de telles atrocités ont pu avoir lieu… On réalise toute l’ampleur de ce génocide et on se demande comment des êtres humains peuvent devenir de tels meurtriers, et envers leur propre peuple !

Les cellules en bois

Quelques photos des victimes

Une mère et son bébé

Lorsque les Vietnamiens libérèrent Phnom Penh le 7 janvier 1979, ils ne trouvèrent que 7 survivants dans le centre et 14 cadavres venant d’être torturés à mort. Leurs corps sont enterrés dans la cour du lycée. Nous ressortons du musée, vraiment bouleversés, et nous aurons du mal à parler pendant de longues minutes, comme si notre esprit était complètement absorbé par ce qu’il venait de voir.

Pour passer à autre chose, nous décidons d’aller déjeuner dans un restaurant indonésien, et qui plus est : Balinais ! La lecture des plats sur la carte nous rappelle les bons souvenirs de notre voyage à Bali, il y a plus d’1 an de ça ! Nous choisissons du « gado-gado », un plat à base de légumes accompagné d’une sauce à la cacahouète… miam, miam ! Nous passons ensuite dans une petite librairie afin d’acheter un livre sur l’histoire du Cambodge pendant la période Khmer rouge afin de mieux connaître cette partie de l’histoire (« Tu vivras, mon fils », de Pin Yathay et « Cambodge année zéro »).

Nous passons le reste de l’après-midi à flâner dans les rues de Phnom Penh. La chaleur est vraiment étouffante, et on s’arrête toute les deux minutes pour souffler un peu et boire un coup (de vrais papis-mamis que nous sommes !). Je pense qu’on battra notre record de bouteilles d’eau et boissons fraiches cette après-midi-là, mais franchement, il fait une chaleur à crever !

Fontaine de nagas

Détail naga (sorte de gros serpent à plusieurs têtes censé protéger)

De manière générale, nous sommes vraiment choqués de voir autant d’enfants qui travaillent dans cette ville : ils vendent un peu tout et n’importe quoi (livres, bracelets, foulards,…) et déambulent dans les rues en quête de touristes qui voudrait bien leur acheter quelque chose. Malheureusement pour nous, on ne sait jamais trop où va l’argent qu’on leur donne… certainement pas dans leur poche directement, surement dans celle d’un adulte (parents ou autre). L’un d’eux, qui ne doit pas avoir plus de 6 ans, vient nous accoster. Il a la frimousse tout sale et un petit aire triste… du  coup, on laisse tomber nos principes et on accepte de lui acheter un “krama” (écharpe traditionnelle cambodgienne à damiers) en l’échange d’1 dollar. Un peu plus tard, nous offrons une part de pizza à un autre enfant qui semble tout content d’avoir quelque chose à manger, à en croire le sourire qui éclaire son visage… On se sent vraiment impuissant face à cette misère, on sait qu’on ne peut pas faire grand chose pour eux, à moins s’investir dans une association et faire du volontariat sur place, c’est vrai que la question nous tarode…

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